Résumé :
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La Critique " savante ". française notamment, se défie peu des déclarations des poètes, qu'elle archive, " établit ", analyse, cite, souvent docilement, au mépris des exigences méthodologiques qui sont les siennes. Consciemment ou non. elle avoue ne pouvoir fonder son autorité qu'en affermissant la leur. La Critique, au lieu de servir ses propres intérêts, consolide ainsi l'Institution poétique qui, dissidente et autocratique, transversale, éparse et diverse, trouve encore le moyen de se déclarer réfractaire à toute institutionnalisation ; en dépit des consensuelles Académies et des arts poétiques. Saint-John Perse prend sur lui d'anticiper sur la Critique, qu'il tente d'orienter ou de neutraliser. Son nom n'appartient pas aux Lettres, et il n'a pas écrit d'art poétique. Mais on le voit, ici et là, évoquer une société secrète (dirait Valéry) de " pairs " pour en faire une galerie de prête-noms qui illustrent ses propres choix. Il n'est de Gide, ni de Claudel ni de Fargue que persiens... ! Aussi l'équation poétique et critique chez Perse pourrait-elle être pensée autrement : c'est le texte qui explique la notice. Car la poésie de Perse s'éclaire de lumineux amers et s'anime de puissantes balises conceptuelles et méthodologiques qui devancent l'emploi même de nomenclatures stylistiques... ; et l'on y voit naître et oeuvrer des concepts " critiques " tels ces motifs totémiques, figurations mythiques nourries au legs de deux rhétoriques, l'antique - " mêlée à la liturgique " - et sa propre logique profonde, qui assimilent amis et oeuvres à ses motifs les plus fréquents. Perse peut là encore (nous) leurrer, mais, chemin faisant, se cristallise autour de son oeuvre une critique, d'abord " motivale ", expression d'une herméneutique, certes personnelle et subjective, mais tout à fait généralisable. La question n'en est pas pour autant résolue pour le critique ; et il devra déconstruire ces " ruses " du " singe de Dieu " par lesquelles Perse suggère, par exemple, que sa poésie est la figuration idéale de la Poésie, de toute poésie...
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